Après avoir envahi les rues de Paris, les trottinettes électriques commencent à débarquer sur le campus de Jean Monnet. Depuis quelques mois, certains étudiants et des membres du personnel enseignant ont en effet décidé de troquer leur pass Navigo contre ce nouveau mode de transport jeune et disruptif. Accessible en free-floating pour quinze centimes la minute ou disponible à l’achat à partir de 200 euros, la trottinette électrique est devenue la nouvelle coqueluche d’entreprises californiennes ou asiatiques. 

La remise au goût du jour d’une activité ludique de notre enfance va-t-elle révolutionner notre mode de déplacement, et si oui à quel prix ?

Effectuer ses déplacements par l’intermédiaire d’une trottinette électrique présente à priori de multiples avantages. Son utilisation serait à priori écologique puisqu’elle ne nécessite pas d’essence pour fonctionner et qu’elle ne rejette pas de dioxyde de carbone. De surcroît, son caractère pliable favorise également l’inter-modalité. Il est en effet possible de commencer son trajet en trottinette électrique et de le finir en métro sans déranger les usagers de la RATP. En outre, sa vitesse de 25km/h liée à une autonomie correcte permet d’effectuer de courts trajets et de se passer des transports en commun. Les constructeurs ainsi que huit opérateurs de trottinettes électriques viendraient ainsi affranchir les citadins de leurs nombreuses mésaventures quotidiennes. Adieu l’attente interminable de votre bus, des malaises voyageurs sur le RER B, l’odeur désagréable des égouts, les pleurs de bébés et, pire encore, les frotteurs dans le métro.

Derrière ce conte de fée se cache cependant une dure réalité. L’urbanisme français, qui peinait déjà à intégrer les vélos à l’environnement urbain, se trouve dépassé face à ce nouveau phénomène de mode. Les rues ne sont adaptées ni à l’apparition des trottinettes en free-floating ni à leur circulation. En 2017, 284 personnes ont été blessées et 5 autres sont mortes à cause de l’utilisation de la trottinette électrique. 

La situation juridique est également très floue. En l’état actuel du droit, seules les trottinettes mécaniques peuvent rouler sur les trottoirs, celles-ci étant assimilées aux piétons. Leurs homologues électriques ne peuvent donc pas circuler dessus mais les pistes cyclables et les routes ne leurs sont pas réservées. Le fait de se déplacer en trottinette électrique n’est pour autant pas susceptible d’être sanctionné par une amende. La circulation sur les pistes cyclables ou la chaussée est, dans la pratique, largement tolérée. Par ailleurs, ces engins à deux roues ne sont pas immatriculés. Or, elle est essentielle car elle permet l’identification du véhicule et du responsable en cas d’accident. Le Gouvernement souhaite donc réglementer la circulation des trottinettes électriques ainsi que l’activité des opérateurs en la matière. Le projet de loi d’orientation des mobilités créerait ainsi une nouvelle catégorie de véhicule afin d’inclure les trottinettes électriques. La réglementation de leur circulation relèverait de la compétence des communes.

Enfin, cette nouvelle tendance met en lumière des difficultés en termes de santé publique et d’environnement. La trottinette électrique, étant fortement utilisée pour de courts trajets, n’incite pas son utilisateur à marcher. Pourtant la pratique d’une activité physique régulière, ne serait-ce-que trente minutes de marche par jour, permet de limiter les risques de surpoids et d’obésité. En outre, l’aspect écologique ne serait qu’un mirage. La fabrication des batteries au lithium engendre des conséquences sanitaires et environnementales néfastes pour l’Homme et la planète. L’utilisation de solvants afin d’extraire le lithium métallique contamine les sols et les sources d’eau, au détriment des populations vivant à proximité des sites d’exploitation.

L’essor de la trottinette électrique dans les rues de Paris et d’autres grandes villes françaises n’annonce ni la venue du messie, ni les prémices du grand soir. En revanche, ce véhicule à la mode est en mesure de vous apporter d’agréables moments, seul ou entre amis, si vous assumez…de porter un casque.

Jérémie CAFFIN